Chemin de sainteté

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Nos évêques et la liturgie : l'impasse ?

Après bientôt 30 années passées à demander que la liturgie voulue par Vatican II soit célébrée dans les paroisses dans lesquelles on se réclame du Concile et après avoir échangé des dizaines de lettres avec le Cardinal Ratzinger - alors Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi - pour tenter de comprendre la crise liturgiques actuelle en France, le temps est venu de dresser un état de la situation actuelle au sein de nos diocèses.

Tout fidèle doit pouvoir participer à la liturgie de l'Eglise.

Et tout fidèle qui veut obtenir la liturgie de l'Eglise en remplacement des célébrations déviantes qui se font dans les paroisses, doit pouvoir la demander à son évêque qui est le gardien et le promoteur de la liturgie de l'Eglise dans son diocèse (Cf. Droit canonique, textes conciliaires et Cérémonial des evêques).

Mais le fidèle qui demande aujourd'hui à son évêque la liturgie de l'Eglise célébrée en latin et grégorien obtiendra-t-il une réponse favorable? Rien n'est moins sûr. Pourquoi? Simplement parce que nos évêques ne semblent pas saisir  l'intérêt qu'il y a à célébrer la messe en latin et grégorien comme Vatican II envisage qu'elle puisse être ordinairement célébrée. Et pourquoi ce manque d'intérêt ? Sans doute par manque de réelle connaissance et compréhension de la forme latine et grégorienne de la messe.

La preuve que nos évêques ne connaissent pas la messe romaine en latin et grégorien? Il suffit de demander à un évêque de France d'expliquer l'histoire de la liturgie et des rites qu'il accomplit pour constater qu'il ne saura pas quoi répondre ou que ses connaissances sont très superficielles, anecdotiques (Cf. Sacrosanctum Concilium, n.14).

Demandons par exemple à un évêque de chanter une pièce grégorienne. Dans le meilleur des cas, il chantera le Gloria de la messe VIII ou un Salve Regina... qu'il massacrera d'ailleurs, ne respectant ni le rythme verbal ni les accents verbaux. C'est à ça que se limiteront souvent ses connaissances en grégorien.

Dites à votre évêque, lorsque vous le rencontrerez, que vous faites partie d'un choeur grégorien. Il vous répondra avec un grand sourire qui en dit long: "Ah, le grégorien! C'est ce qui a bercé toute ma jeunesse!" Sous entendu: "C'était bien autrefois, mais plus maintenant..."

Pour nos évêques-gardiens-et-promoteurs-de-la-liturgie, le chant grégorien n'est donc qu'une musique capable d'éveiller chez eux des souvenirs de jeunesse et le latin est pour eux une langue dont l'apprentissage les a prodigieusement ennuyé.

Ça ne va pas beaucoup plus loin.

Le grégorien n'est donc, pour nos pasteurs, qu'une musique parmi d'autres. Voilà pourquoi ils sont incapables de saisir ce que veut dire le Concile lorsqu'il enseigne que "le grégorien est le chant propre de la liturgie romaine qui doit occuper la première place" (Cf. Sacrosanctum Concilium). Car pour comprendre pourquoi l'Eglise considère le grégorien comme "le chant propre de la liturgie romaine", il faudrait, premièrement, connaître le chant grégorien et, deuxièmement, comprendre sa fonction liturgique. Mais pour connaître et comprendre le grégorien, il faut le pratiquer... longtemps, régulièrement. Il faut s'en imprégner à travers la prière au choeur. Ce que nos évêques ne font jamais...

Certes, à l'occasion d'une retraite dans un monastère, il leur arrive de chanter ou d'entendre du grégorien à la messe et aux offices. Mais alors, ce chant leur apparaît simplement comme "la musique des moines"; en dehors du monastère, il n'y aura pas de raison de le chanter, de le cultiver... puisque les paroisses ne sont pas des monastères et que les paroissiens ne sont pas des moines. Nos évêques sont donc devenus incapables de comprendre la vraie raison d'être du chant grégorien dans la liturgie.

Il en est de même pour l'usage du latin. Certes, à l'occasion d'un voyage à Rome, il leur arrive de concélébrer la messe en latin. Mais alors, le latin leur apparaît simplement comme une "langue étrangère" utilisée pour des raisons uniquement pratiques dans le cadre des célébrations qui se font au Vatican. En dehors du Vatican, il n'y a pas de raisons de l'employer. D'ailleurs - nous répètent-ils - les gens ne le comprennent pas. Nos évêques sont donc devenus incapables de comprendre la raison d'être d'une langue spécifique dans la liturgie de l'Eglise.

On peut donc facilement imaginer que bien qu'ils reconnaissent que Benoît XVI est un spécialiste de la liturgie (on ne sait d'ailleurs pas si, chez eux, cette reconnaissance est sincère), ils ne comprennent pas pourquoi ce Souverain Pontife tient tellement à retrouver l'usage du latin et du grégorien. Ce doit être, aux yeux de beaucoup, une lubie de pape vieillissant...

Nos évêques semblent ne pas pouvoir comprendre que pour être "spécialiste de la liturgie", il faut commencer par "vivre de la liturgie". Ce que le Saint-Père, lui, a compris depuis sa jeunesse. Comme d'autres avec lui.

Il arrive parfois que nos évêques autorisent la célébration de la messe en latin. Souvent sous sa forme "extraordinaire", plus rarement sous sa forme "ordinaire" dont répétons-le, ils ne voient pas l'intérêt (l'ancien porte-parole de la CEF nous l'avait clairement dit). Mais l'on constate rapidement à leur façon de se tenir à l'autel qu'ils ne sont pas convaincus qu'une telle célébration puisse être d'un bénéfice quelconque pour les fidèles qui la demandent. Dans quel but l'Eglise veut-elle maintenir et favoriser ces formes de la liturgie latines et grégoriennes dont la portée est universelle et dont la portée doctrinale est garantie?  Cela semble leur échapper. Ils ne semblent attacher aucune importance au fait que la messe soit célébrée comme-ci ou comme cela, du moment que cela plaît aux fidèles présents et pourvu que ça ne fasse pas de vagues dans le Landerneau ecclésiastique. La preuve qu'il ne sont pas convaincus du bien-fondé de ce qu'ils font lorsqu'ils célèbrent en latin et grégorien: ils sont capables tout en même temps de respecter la forme "extraordinaire" et de maltraiter systématiquement l' "ordinaire".

Ainsi, ce qui semble compter à leurs yeux, c'est de pouvoir s'adapter sans cesse aux circonstances qui se présentent ("sport" qui les épuise!) sans chercher à comprendre pourquoi il est capital de traiter la liturgie comme l'Eglise demande qu'elle soit traitée. Ce qui importe, ce n'est pas tant de respecter la liturgie que de l'utiliser à des fins personnelles ou jugées pertinentes sur le plan de la relation, de la communication, de la mise en valeur d'un thème ou d'un événement (comme par exemple la création d'un nouveau secteur paroissial ou la nomination de "laïcs en responsabilité".)

On trouve enfin quelques évêques qui disent aux fidèles venus s'adresser à eux: "Vous voulez du grégorien? Je n'ai rien contre." A première vue, ça peut sembler réjouissant et encourageant qu'un évêque n'ait rien contre le grégorien.

Pourtant il y a là, dans une telle réponse, quelque chose qui cloche. L'évêque ne devrait-il pas plutôt répondre aux fidèles: "Vous n'avez pas à me demander une autorisation pour faire ce qui, aux yeux de l'Eglise, est pleinement légitime et doit être encouragé"?

"Je n'ai rien contre le grégorien"! Réfléchissons un instant: et si l'évêque avait quelque chose contre, ça devrait changer quoi? Depuis quand les goûts d'un pasteur devraient-ils primer sur les enseignements de l'Eglise en matière de célébration de la foi?

Ainsi, il est devenu très clair que pour bien des évêques de France, le respect que l'on doit avoir pour la liturgie latine et grégorienne de l'Eglise ne s'appuie pas sur une connaissance en profondeur de de cette liturgie, mais plutôt sur des considérations totalement étrangères à la célébration de la foi.

C'est gravissime, car ça tend à prouver que 1) la véritable nature de la liturgie leur échappe encore et que 2) l'action du pape Benoît XVI en faveur de la mise en oeuvre de Vatican II les dépasse totalement (à l'exception de trois ou quatre d'entre eux qui ont bénéficié d'une réelle formation... généralement hors des séminaires diocésains où l'on apprend pas grand-chose).


Source.



10/09/2010
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